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Etudiante en Information-Communication à l'Université Paris VIII

dimanche 23 septembre 2012

"The We and The I" : une (r)évolution


Ici, le talent de Gondry se manifeste clairement par le fait qu'il n'utilise qu'un simple bus en guise de décor avec pour arrière plan les rues "charmantes" du Bronx. C'est admirable de voir que l'on peut se débrouiller à faire un bon film avec du fond, un aspect vraiment réaliste (notamment en remarquant les personnages qui sont "vrais", sans maquillage, sans artifices, sans les mensurations qu'on nous impose à longueur de temps dans les magazines, juste naturels) sans sortir un budget faramineux de sa poche. John Carter, lui qui fut produit par les studios Disney, avec 300 millions de budget s'est annoncé comme un flop, comme un véritable échec commercial.

Chez Gondry, le décor, similaire du début à la fin, n'empêche en rien une évolution remarquable de l'histoire ; les "vrais" acteurs, on peut le dire, ce sont les acteurs, "physiques", j'entend bien. Cette affirmation a l'air évidente dite comme cela mais il s'agit de tout l'inverse dans beaucoup de films qui ont beaucoup de succès auprès de la population "cinéfile", notamment auprès des jeunes, il s'agit de la plupart des blockbusters, ce qui est bien dommage (non pas pour le fait qu'ils soient quasiment nourris uniquement d'effets spéciaux mais pour les conséquences hypercommerciales engendrées par ce type de film). Les gens ont tendance à être attirés par des films interprétés pas des stars mondiales, souvent américaines, dans lequel sexe et baston font bon ménage, et si possible dans un cadre spatio-temporel irréaliste, voire merveilleux. Cela les distrait, les font voyager le temps d'une heure et demi. Et après ils retombent cruellement dans la réalité.
 
Chez Gondry, les acteurs ne sont pas connus, cela se voit qu'ils ont tous un âge "normal" pour être au lycée (15-17 ans) ce qui est parfois inconcevable dans certains films où les lycéens sont mis en scène dans des ébats sexuels souvent mal considérés pour leur âge. Pour cela, on demande à des personnages plus âgés (d'une vingtaine d'années), qui ont dit depuis longtemps "bye-bye" à l'acné et qui ne savent même plus quand ils ont copuler pour la première fois, d'incarner ce type de rôle. Et pourtant, les personnages aussi jeunes que ceux qu'ils représentent sont tout simplement "vrais", je le répète, ils sont même parfois plus talentueux de par ce naturel probant que certaines stars télévisuelles qui n'ont qu'un seul but, celui de déployer leur narcissisme derrière un personnage manichéen. Les personnages de The We and The I ne sont pas soit "gentils" soit "méchants", ils sont tous différents les uns des autres et chaque personnage a lui même un caractère, une sensibilité qui évolue, change tout au long du film. Plus le nombre de passagers diminue, plus l'on se porte sur la personnalité réelle des derniers. Ils sont comme révélés lorsqu'ils ont quitté leur bande derrière laquelle ils se cachaient, une bande qui s'unit pour construire une carapace superficiellement violente et méprisante à l'égard des autres. Le film se divise d'ailleurs en ces trois parties volontairement mises en avant par le réalisateur qui réussit humblement à les dissimuler dans l'étroit décor du film : "les tyrans", "le chaos", "le je".

Même si on peut trouver incroyablement long le trajet entreprit par le bus, on ne se lasse pas une seconde. On se laisse porter par la camera de Gondry qui réussit à passer de tête en tête, de groupe en groupe, avec une facilité, un naturel déconcertant, puisque même s'ils sont disposés en groupes, ces individus interagissent directement ou indirectement ensemble. Les courts et fréquents passages qui mettent en scène des vidéos amateurs soulignant le discours des adolescents, des vidéos montrant ces personnages dans des situations déconcertantes voire navrantes, servent même de transition, entre les parties de ce film.

Un défaut? Parfois la vraie vie peut être ennuyeuse à vivre mais surtout à regarder quand on se place au niveau de sa continuité. C'est peut-être ce qu'on peut reprocher à ce film, le fait d'être "trop" réel, comme si que l'on était un fantôme, un être invisible et que l'on regardait cette longue scène d'une heure et quarante trois minutes sans jamais fermer les yeux. La plupart des films, il faut le dire, sont inscrits dans un cadre temporel très long, parfois pouvant atteindre des dizaines d'années, comme si leurs réalisateurs voulaient axer le film sur un seul sujet et balayer tous les autres, sur l'action la plus commerciale, et supprimer tous les autres actions qui auraient pu figurer dans le film. Donc, est-ce vraiment un défaut?

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